"Il y a des matins plus clairs que d'autres."
Celui-ci aurait pu être considéré comme "gris". Oh, non pas le temps, bien que la voûte céleste fut emplit d'une brume grisâtre. Mais plutôt dans l'humeur de la personne s'éveillant. Il était bien tôt. Mais, il n'avait eu besoin d'aucun aide pour se lever. Comme s'il était parfaitement assimilé de se lever à ce moment que le corps le faisait mécaniquement, chaque jour. Point d'entrain, sans pour autant refuser de voir poindre le jour. Ni blanc. Ni noir.
Gris.
Pour la énième fois, il avait passé la nuit en compagnie de ses cauchemars. Tel l'enfant redoutant avec effroi le monstre lové sous son lit.
Ridicule.
Il se trouvait tout simplement ridicule. Pensa-t-il dans un léger soupir.
Ce n'était qu'une peur infantile dont il n'arrivait à se détacher.
Refus de grandir? Possible.
Un caprice? Sans doute.
Ainsi, Cyanide réfléchissait.
Sa journée avait commencé comme bien d'autres. Il s'était lavé et vêtu de la toge blanche d'usage des prêtre avant de se rendre à l'office du matin. Puis, après seulement, il avait pu manger. Ensuite il était allé chercher ses écrits dans sa chambre, non sans se perdre au passage: il avait oublié son plan. Après maintes péripéties dont le "non monsieur, je ne viens pas chercher un portion supplémentaire, je cherche ma chambre" à l'employé des cuisines, il arriva enfin et pu récupérer ses livres et, au passage, son plan. En feuilletant quelques pages il pu conclure ce dont il se doutait il y a quelques jours: il lui manquait en effet un livre. Traitant de la foi et de ses aspérités. C'est pourquoi le jeune homme avait noté sur son emploi du temps du jour:
Matin: Passer chez le bouquinisteCherchant dans ses papiers, il récupéra une note, sur laquelle était inscrite l'itinéraire pour se rendre sur le lieu. Courageux, mais pas téméraire, il n'aurait pas tenté l'aventure sans, conscient de ses capacités limitées en orientation, prouvées une nouvelle fois quelques instants plus tôt.
Mettant ses papiers dans sa sacoche, une sensation, ô combien désagréable, mais, ô combien familière le prit au ventre.
Le jeune prêtre tourna la tête sur la gauche. Puis sur la droite.
Personne.
Entre cette nuit et à présent, il était gâté. Il s'attendait à ce que cela recommence dans la journée. Puisque, comme dit le proverbe: Jamais deux sans trois.
Cyanide quitta le temple d'un pas rapide, soucieux de respecter son emploi du temps. Pour ne laisser aucune pensée gênante faire place dans son esprit. Il préféra même penser au sujet de son livre, tandis qu'il marchait, vérifiant régulièrement son parcourt sur sa note. Le deuxième enfant des Korrigan s’intéressait depuis quelques temps au sujet de la Foi. Cette manière qu'à cette matière inconstante à pénétrer dans les âmes des gens.
Mais surtout, la manière de s'en détacher.
Il arriva chez le bouquiniste et le salua poliment d'un signe de tête avant de chercher entre les étalages le livre pour lequel il s'était déplacé. C'était un petit magasin reculé dans une ruelle. Mine de rien, on pouvait y trouver certains livres rares, surtout ceux traitant de religion et des dieux. Finalement, Cyanide mit la main sur le livre. Vieux, la reliure quelques peu abîmée, il s'en moquait. C'était le contenu, le plus important.
Le prêtre paya l'ouvrage poussiéreux et sorti en le rangeant précautionneusement dans sa sacoche. Avec un crayon, il raya la mention du matin sur son carnet: il risquait d'oublier qu'il l'avait accomplie. Sacrée mémoire.
Mais, ce faisant, il n'avait remarqué que sa note pratique traitant de son itinéraire lui avait échappé. Flottant un peu avant de tomber sur le sol.
Cyanide partit, inconscient de sa perte.
Ce n'est que quelques ruelles plus loin, en voulant vérifier sur la-dite note qu'il réalisa. Silence. Sa sacoche ouverte.
Idiot.
Idiot.
En plus, il avait prit soin de ne passer que par des ruelles, pour éviter les rues plus grandes et plus fréquentés. Le voilà qui se retrouvait seul. Dans un amas de ruelles. De bon matin. Sans plan pour rejoindre le temple Kenmei.
Mais quel idiot!
C'est après maintes hésitations et insultes mentales qu'il se décida à avancer. Il avait réussi à venir, il trouverait bien le moyen de sortir de là, non?
Il fallu plusieurs ruelles pour qu'il se rende à l'évidence: non.
En plus, il devait certainement tourner en rond.
Soudainement, ses cheveux se dressèrent sur sa nuque. Ce qu'il craignait revint à lui. Le corps du jeune homme s'immobilisa, ses muscles se crispant. Il avait cru entendre des pas. Sa crainte lui fit oublier que ce n'aurait pu être qu'un habitant du quartier. Tout de suite il pensa à
lui.
Jamais deux sans trois n'est-ce-pas.
Il sentait les cordes maintenant ses lames contre ses avants-bras, bien cachés sous ses manches. Cela le rassurait.
Tant bien que mal, Cyanide essayait de régulier sa respiration. Pour mieux penser. Il devait penser calmement, alors qu'il entendit effectivement le son de pas contre le sol pavé.
Il y avait quelqu'un.
Calme.
Calme.
C'est après une lente inspiration que sa voix s'éleva:
-Qui est-là?- d'un ton un peu trop sec, malgré lui.
Il attendit une réponse, ou de voir la personne. L'un de ses poings crispé sur sa sacoche, l'autre prêt à être utilisé pour sa défense. Puisque malgré tout: on ne sait jamais.